Mediator, kesako ?
Cela fait maintenant près d’un an que l’ « Affaire Mediator » occupe la première place dans l’actualité santé. Vous vous demandez peut-être de quoi il s’agit, pourquoi tout le monde s’agite jusqu’à Bruxelles et pourquoi cette crise va tout changer dans l’univers de la santé. J’ai essayé de vous résumer tout ça dans cet article.
Le Mediator, qu’est-ce que c’est ?
Le Mediator était un médicament prescrit aux diabétiques pour les aider à perdre du poids. La mise sur le marché d’un médicament de ce type se fait sur la base d’un dossier scientifique constitué d’études cliniques, qui doivent conclure à un bénéfice pour le patient plus important que les risques inhérents à la prise d’une molécule active.
Hé oui, toute prise de médicament entraine des effets secondaires potentiellement dangereux pour la santé, même l’aspirine, même le paracétamol !
Normalement, tout médicament fait l’objet d’une surveillance après sa mise sur le marché, pour vérifier qu’il n’y a pas d’autre effet secondaire que ceux pris en compte pour le calcul de la balance « risques-bénéfices ». Parfois, l’arrivée sur le marché de nouvelles molécules entraine le retrait d’autres, car elles sont plus efficaces et/ou moins toxiques. Parfois, il faut beaucoup de temps pour détecter les effets négatifs de certains médicaments, et cela donne des catastrophe comme celle du Distilbène.
L’Affaire Mediator
Le médicament a été retiré du marché en novembre 2009, l’annonce faite par la Société Française de Cardiologie encourage les médecins prescrivant du Mediator à rechercher une valvulopathie (dysfonctionnement du coeur). Ce retrait n’est pas un scandale, pas encore…
Celles par qui le scandale arrive sont deux femmes, Flore Michelet et Irène Franchon. La première est une doctorante en pharmacie, dont le sujet de thèse est précisément le retrait du Mediator. Irène Franchon est dans son jury, et sort quelques mois après un livre « Mediator 150 mg – Sous titre sensuré ».
Cette dernière fait des pieds et des mains pour faire éclater au grand jour les dysfonctionnements, voire les malversations des différentes parties-prenantes de l’affaire que sont le laboratoire Servier, les instances de surveillance, les médecins. En effet, dans cette affaire de nombreux doutes planent sur la validité de la surveillance après la mise sur le marché, voire même des études qui ont permis la commercialisation du Mediator.
La conséquence de ces dysfonctionnements : entre 500 et 2000 morts.
Concernant les médias, la revue Prescrire a eu un rôle non négligeable dans l’Affaire car elle a été une des premières à relater les études montrant la dangerosité du Mediator.
Je ne rentrerai pas plus dans le détail du risque / bénéfice et des études cliniques. Pour plus d’information, je vous conseille d’aller voir le blog de GrangeBlanche et de taper « Mediator » dans la barre de recherche…
Ce que ça change
L’Affaire du Mediator fait scandale car elle illustre un manque de transparence et d’éthique à de nombreux niveaux de l’organisation du système de soin en France. Outre des analyses plus ou moins complaisantes des effets secondaires des médicaments, des conflits d’intérêt passés sous silence de certains experts, la publicité / communication mensongère du laboratoire sur son produit, et enfin la prescription abusive du médicament à des personnes qui n’auraient jamais dû en prendre, c’est la notion de responsabilité qui revient en première ligne.
Il ne servirait donc à rien d’avoir un système de mise sur le marché aussi drastique, des chartes éthiques dans les entreprises, de faire des études de médecine à rallonge ? Je n’irais pas si loin. Ce que l’Affaire Mediator change selon moi, c’est le rapport à sa propre responsabilité. Toutes les parties-prenantes font leur analyse, des instances européennes les plus élevées aux médecins de campagne. Certains le font plus discrètement que d’autres : les journalistes, les patients, les agences de communication ?
Le dogme de la minceur
Derrière cette Affaire, il y a tout de même un point qui n’est pas souvent discuté : qu’est-ce qui a poussé les médecins à prescrire un médicament pour les diabétiques à des non-diabétiques ? C’est son effet « coupe-faim ». Et la demande de patients qui souhaitent maigrir sans effort.
« Ils n’ont qu’à moins manger » me direz-vous. Ce n’est évidemment pas si simple… Pour que l’Affaire Mediator ne se reproduise pas, il faudrait aussi remplacer le dogme de la minceur par le dogme de l’équilibre de vie… J’ai l’impression que c’est de la responsabilité de chacun d’entre nous de promouvoir ces valeurs.